Lors de ce conseil municipal a été abordé la question du projet de plateforme de ferroutage prévue sur une zone des ardoisières classée "à risques" d'effondrements.
Boris Battais est intervenu (lire ci-dessous) pour appeler à la raison et à ne pas jouer les apprentis sorciers !
Chèr.e.s collègues,
Il y a plus d’un an, en juin 2023, nous avons donc déjà eu à traiter cette question du Plan de Prévention des Risques Naturels Mouvements de terrain liés aux anciennes exploitations souterraines des Ardoisières d’Angers.
Pour la séance de ce soir, et comme nous l’avions fait pour la séance de juin 2023, nous avons donc écouté attentivement les explications fournies par les techniciens de la Ville lors de la commission de lundi dernier et avons lu avec tout autant d’attention la note de synthèse ainsi que les documents que nous avons du aller chercher sur le site de la préfecture (puisqu’ils ne nous avaient pas été transmis).
Sur la carte des aléas, en 2023, nous avions, comme vous, reconnu la qualité du travail des spécialistes et du BRGM et émis un avis favorable sous réserve de réalisation d’études complémentaires sur les sites concernés. Nous avons bien entendu pris note de l’ajout des têtes de puits (qui n’étaient pas répertoriées lorsque l’avis de la commune avait été sollicité en juin 2023) et du fait que les périmètres de ces zones de puits sont désormais intégrés à la carte des aléas. Nous avons aussi bien lu dans la note de synthèse que, suite aux échanges du Copil du 6 juin dernier, « les services de l’Etat ne mèneront pas et ne souhaitent pas réaliser d’études complémentaires (...) compte tenu de la qualité et de la robustesse des études menées par le BRGM depuis plus de 10 ans » et des éléments précisés par les techniciens de la Ville lors de la commission au sujet des difficultés techniques pour mener de telles études.
Concernant la carte des enjeux, nous avons donc, comme vous, pris acte des remarques prises en compte concernant le maintien en zone urbanisée des parcelles AI 66, 69, 76, 77 et 79, sur le secteur des Fresnaies, celui concernant la parcelle AZ 89 ainsi que le passage en zone non-urbanisée de la parcelle AV 1434, sur le secteur des Malembardières.
Par contre, les réponses fournies au sujet de l’accompagnement, de l’avenir et de la valeur des constructions existantes, pour celles en zone d’aléa fort ou moyen au premier chef (CR du Copil du 6 juin 2024, p.4) posent question. En effet, concernant les indemnisations des particuliers, nous avons aussi bien lu que le Fonds Barnier pouvait financer des actions en cas de péril imminent (en cas de menaces graves pour les personnes et les biens) mais l’argument pour expliquer qu’il n’y aura pas d’indemnisation relative à une potentielle perte de valeur nous interroge. En effet, la DDT souligne dans sa réponse que « cela a été confirmé lors d’une question au ministre en 2022 (question n°42595) » et que « l’argument avancé est que « ce n’est pas le PPR qui crée le risque, le risque existait avant » ». Reste que de nombreux trélazéens n’avaient pas nécessairement connaissance des aléas, de leur intensité, des enjeux et finalement des risques au moment de l’achat de leur bien, ce qui revient à considérer leur choix d’acquisition comme « non éclairé ». Nous pensons qu’il y a là un sujet sur lequel il conviendra de revenir pour sécuriser les administrés concernés sur l’aspect économique et financier, position que nous défendions déjà en juin 2023. S’il convient bien entendu de ne pas transiger avec les risques liés aux phénomènes potentiellement redoutés, il est légitime et essentiel de protéger humainement, mais aussi économiquement et financièrement les habitants des conséquences des décisions qui seront prises.
Concernant maintenant les zones évoquées dans la délibération et donc, d’abord Monthibert, nous avons bien entendu que vous contestiez le fait d’exclure de l’urbanisation ces secteurs (zones Nl : secteur destiné aux activités de loisirs, sportives, culturelles, touristiques ou d’hébergement hôtelier et Ng : secteur destiné à l’exploitation des richesses du sous-sol ou au stockage de déchets inertes et de déchets verts dans des installations autorisées) qui pourraient accueillir des projets à moyen-long terme. Ce sont des sujets qui posaient déjà question il y a plus d’un an et que nous avions aussi relevé comme un des points à éclaircir. Nous avons donc pris connaissance de la réponse de l’État, à savoir qu’il pointe une renaturation de la zone et souhaite conserver ce secteur en ZNU au titre des PPR pour empêcher l’ajout d’enjeux humains et économiques qui aggraveraient le risque, ce qui serait contraire au principe d’un PPR.
Nous avons aussi bien lu que vous avez contesté le fait que cette zone soit considérée comme naturelle et appelé à ce qu’elle soit bien considérée comme une zone industrielle qui répondrait aux exigences de la loi ZAN pour la reconquête des friches industrielles. Vous avez souligné que ce secteur constitue l’une des rares opportunités pour la commune. La DDT a répondu que « même si on peut considérer que cette zone est artificialisée, cela ne veut pas dire qu’elle est urbanisée » et que « dans les secteurs à risques, les secteurs non urbanisés doivent le rester », cela étant « un principe de base de l’élaboration des PPR ». Aussi vous a-t-on précisé que « la construction d’habitation ne semble pas possible et contraire à la prévention des risques » et que « l’ajout d’habitations augmenterait considérablement les enjeux sur une zone à risque » mais que l’implantation de parcs photovoltaïques pourrait par contre y être envisagée comme des aménagements légers (type jardins familiaux, aménagements paysagers ou de loisirs) sur les zones d’aléas faible ou très faible en ZNU. (CR du Copil du 6 juin 2024, p.5 et 6).
Pour la Gravelle, nous avons aussi abordé ce point lors de la commission de lundi dernier. Tout d’abord, je tiens à rappeler que ce point n’avait pas été abordé lors de nos échanges en juin 2023, il y a donc un an et demi. Comme cela est indiqué dans la délibération, la commune n’avait alors pas formulé de remarque quant au passage en zone non urbanisée du site de la Gravelle. Et pour cause… Nous n’avions pas connaissance du projet de plateforme de fret ferroviaire porté par ALM.
Cette situation nous fait d’abord réagir sur la forme et la démarche. Le fait que nous n’ayons pas eu connaissance à l’époque (en juin 2023) de ce projet alors qu’il était sinon déjà ficelé, au moins dans les tuyaux (il est sorti dans la presse à l’automne 2023), nous interroge. Soit, vous étiez au courant et vous ne nous l’avez pas dit à l’époque, soit vous l’avez découvert en même temps que nous, ce qui serait hallucinant et révélateur d’un manque de démocratie et de transparence au sein de notre structure intercommunale. Je n’insisterai pas non plus sur ce que cela signifierait en terme de considération à l’égard du maire de Trélazé qui est aussi, accessoirement, vice-président d’ALM.
Concernant le fond maintenant. Aujourd’hui, vous contestez donc le passage en zone non urbanisée du site de la Gravelle en raison de ce projet de plateforme. Avant toute chose et pour éviter de faux débats, je tiens à rappeler que tous ici, nous sommes favorables au développement du ferroutage. Il fait même partie intégrante des programmes que nos différents partis politiques portent nationalement. Donc, de notre point de vue, il n’y a pas de débat ou de différent sur ce point. Le cœur de notre débat est bel et bien de savoir si le site de la Gravelle est adapté ou non à recevoir une telle structure.
Le projet qui nous a été présenté est un projet « favorisant la massification des flux, la mutualisation des moyens et la complémentarité des modes de transports, à travers la réhabilitation d'un site industriel de 25 hectares en hub multimodal avec raccordement au réseau SNCF ». La cible est de « 90.000 transbordements par an soit 20 trains en Aller/ Retour par semaine ». Quelques chiffres encore : le terminal de transport est prévu sur 10 ha, la voie de réception sur 850 m, deux plateformes sont prévues pour traiter deux trains simultanément. La plateforme de stockage, elle, est prévue sur 12 ha et avec plus ou moins 43 000 m² de stockage.
Au regard des plans fournis dans le document de présentation du projet (que nous avons dû attendre des mois après notre demande) et de la carte des aléas, nous avons donc un aménagement d’ampleur sur et à proximité de zones en aléas moyen ou fort. C’est ce que montre la superposition des cartes. Et je ne parle pas de la masse et des flux des poids lourds et des trains sur un tel site, de leurs potentielles conséquences compte tenu des aléas.
Vous me direz sans doute qu’il y aura la possibilité de modifier le projet, d’en revoir le dimensionnement, etc. Mais, visiblement, nous n’avons, vous comme nous, la main sur rien. Le seul projet qui existe à notre connaissance est celui qui nous a été présenté ! Et c’est au nom de ce projet que vous souhaitez le maintien de ce secteur en zone urbanisée.
Vous me direz aussi sans doute que l’État doit prendre ses responsabilités. C’est ce que vous m’avez dit lors de la commission. Alors oui, je suis d’accord et dans tous les domaines (comme par exemple sur la sécurisation financière des habitants concernés, j’en ai parlé tout à l’heure). Mais quand les services de l’État considèrent qu’il y a un risque et qu’ils disent « Niet » comme ici, j’ai le sentiment qu’ils prennent leurs responsabilités. Et comme je vous l’ai dit lors de la commission : il n’y a pas que l’État qui doit prendre ses responsabilités. Nous aussi ! ALM aussi !
Et au-delà, si le choix était fait de développer un tel projet sur ce site, je souhaite bien du courage aux futurs élus pour faire accepter aux particuliers concernés la légitimité des réglementations strictes qui leur seront imposées… Beaucoup auraient sans doute l’impression de deux poids deux mesures.
Les risques décrits par les scientifiques qui ont travaillé sur ce dossier sont bien réels et ils sont à prendre très au sérieux. Chacun en conviendra. De notre point de vue, il serait donc déraisonnable, voire irresponsable, de demander la modification du classement en raison d’un projet de grande ampleur tel que je l’ai décrit plus haut. Trop nombreux sont ceux à avoir voulu défier la nature et ou à être passés outre des conclusions des scientifiques pour voir aboutir leurs projets en terme d’aménagement du territoire coûte que coûte. Beaucoup s’en sont mordus les doigts à la première catastrophe. Les exemples sont malheureusement trop nombreux pour s’amuser aujourd’hui à jouer les apprentis sorciers ! En revanche, la question des dédommagements, des accompagnements, etc. est sur la table et doit être discutée avec l’État, les pouvoirs publics.
Je terminerai mon intervention sur un point. Cette délibération pose la question du devenir du site ardoisier, un site qui, compte tenu de notre histoire, impose de garantir la sécurité des habitants face à des risques que personne ne conteste. Aussi devons-nous en effet nous interroger sur la nature même du développement que nous souhaitons pour Trélazé, un développement qui permette à la fois de valoriser le site ardoisier (comme un atout) sans le « mettre sous cloche » en respectant les contraintes réglementaires avec lesquelles il nous faudra composer.
Depuis plus de 10 ans, nous demandons que soit réfléchi collectivement le devenir du site ardoisier. Nous pensons d’ailleurs que la réflexion doit être globale et qu’elle ne doit être menée secteur par secteur, qu’elle ne doit pas être « saucissonnée » sur les différentes parties du site (Fresnaies, Gravelle, Porée, carrière Napoléon, Monthibert...).
Nous avons des propositions, d’autres en ont aussi.
De notre point de vue, il y a matière à travailler un projet exemplaire basé sur un mode de développement durable et humain. Pour cela, une véritable concertation doit avoir lieu bien en amont. Lorsqu’il ne s’agit plus que d’avaliser ou non un projet ficelé, ce n'est plus de la concertation !
Faire le choix du développement durable et humain suppose bien sûr de le penser selon des enjeux économiques, mais aussi sociaux et environnementaux et ce, à plusieurs échelles.
Les potentialités du site sont nombreuses dans des secteurs variés y compris dans ceux touchant au tourisme, à la culture, au patrimoine et aux loisirs. Des pistes concernant le développement de parcs photovoltaïques sont donc aussi évoquées dans les documents de la préfecture.
La présence d'un site comme le nôtre constitue aussi un levier que nous pourrions activer dans l'intérêt de la jeunesse. C’est le sens de notre proposition de mise à l’étude la construction d’__un centre d'accueil de classes vertes. Du point de vue pédagogique et patrimonial_, Trélazé et le site ardoisier sont particulièrement « exploitables » (histoire industrielle et sociale, Sciences et Vie de la Terre, EPS, etc.). Nous disposons aussi des Anciennes Écuries, du musée de l'Ardoise, d’un riche patrimoine industriel et minier … Et que dire de l'ouverture sur Angers et ses potentialités culturelles, sur l’Authion et la fosse de Sorges (avifaune) ou encore sur la vallée de la Loire, au moins jusqu'à Fontevraud ? De nombreux acteurs peuvent être mis autour de la table pour réfléchir et agir sur ce point.
Enfin, bien sûr, comment penser ce site sans évoquer son caractère exceptionnel du point de vue écologique et environnemental ? Les intérêts sont certains concernant aussi bien la faune, la flore, ou les caractères géologiques du site. Il s'agit là d'un site d'une richesse écologique unique dont la préservation et la valorisation doivent constituer un axe essentiel du projet.
Nous avons aussi fait la proposition de profiter de ce formidable espace pour réfléchir à l’installation de jardins bio visant à alimenter les restaurants scolaires de la ville. Nous avons fait cette proposition lors du dernier budget en donnant des exemples de réalisations qui fonctionnent ailleurs.
Alors oui, cette délibération pose en effet la question du développement que nous voulons pour la ville, une ville qui par son histoire, doit composer avec un territoire particulier. Nous croyons qu’il est grand temps d’en discuter avec les acteurs locaux et les habitants pour construire le Trélazé de demain.